Des rayons de lumières venaient taquiner les paupières de la Serpentard, ainsi que le bruissement d’un feu qui s’agite. Elle ouvrit les yeux, et au lieu de retrouver le plafond de son dortoir, elle voyait un plafond bien plus structuré, et beaucoup plus haut aussi. Elle fronça les sourcils et regarda quelques instants, avant que quelque chose bouge en dessous elle. Elle tourna la tête et se releva doucement. Elle était sur un des immenses canapés en cuir de la Salle Commune des serpents. En dessous elle se trouvait son meilleur ami, Justin, qui dormait encore comme un bébé. Elle se demanda comment elle était arrivée ici. Qu’avait-elle fait la veille. En regardant ses vêtements, elle portait une robe verte qui lui arrivait à mi-cuisse. Ses bretelles étaient complètements descendues, et aux pieds du canapé gisait une paire de talons aiguilles. Elle passa sa main dans ses cheveux. Elle ne voyait pas la tête qu’elle avait, mais en réalité sa chevelure était ébouriffée et très emmêlée. Elle se recoucha sur Justin, en voulant le réveiller. Ce qui marcha, même si elle l’entendit marmonner des injures à son égard.

- Tu sais quelle heure il est ?
- Aucune idée … tu m’écrases la jambe là.
- Pardon. On était où hier soir ?
- Aux 17 ans d’un Poufsouffle, je sais plus qui.
- Ahm … j’étais si défoncée que ça pour ne pas m’en souvenir.
- Euh … ouais quand même. Tu t’es déchainée Heaven.
- Je n’aime pas quand je ne me souviens pas.
- Ben je peux te dire que les mecs ont aimé.
- J’ai fait quoi ?
- T’étais tellement arrachée que t’as commencé à danser sur les tables et tout ça.
- Justin ?
- Quoi ?
- J’ai plus mon soutif !
- Ah ben il a du être content le barman.
- Il était mignon au moins ?
- Grand brun, musclé, et il avait un petit bouc très sexy.
- Dommage que je ne m’en souvienne pas.

Heaven entendit des bruits de chaussures dans les escaliers venant des dortoirs. Elle se releva, c’était un élève de cinquième année. Si en plus du jour, des élèves commençaient à descendre, il fallait impérativement qu’elle remonte dans son dortoir. Sans prévenir Justin de ses gestes, elle prit ses chaussures, et monta dans son dortoir. Elle n’avait pas tellement d’équilibre, et elle manqua de se prendre plusieurs fois les marches, où d’entrer dans le dortoir des sixièmes années.

* Alexia y était ou pas ? *

Elle se posa la question, mais n’y réfléchit pas pour autant. Elle commençait à avoir un mal de crâne intense, ce qui n’allait pas l’aider pour sa journée. Elle ne savait ni quelle heure il était, ni quelle jour il était, elle ne savait rien, sauf qu’elle avait la gueule de bois, qu’elle manquait cruellement de sommeil et qu’elle allait être de mauvaise humeur toute la journée. Lorsqu’elle trouva enfin la bonne porte, elle manqua de tomber sur Layanna lorsqu’elle déambula jusqu’à son lit qui se trouvait bien évidement tout au fond. Elle aurait du s’arranger pour qu’il soit juste à côté de la porte étant donné qu’elle sortait souvent au beau milieu de la nuit. Bref, elle s’allongea, ivre morte, on pouvait le dire, même si elle n’était pas fraichement bourrée en cet instant. Bras écartés, une jambe pendait dans le vide, elle était complètement crevée. Mais en aucun cas elle regrettait cette soirée. Ce qui l’agaçait le plus c’était qu’elle ne se souvienne pas. Elle n’aimait pas lorsqu’elle oubliait. Elle avait déjà perdu cinq années de sa mémoire. Alors perdre quelques minutes encore et toujours revenait de l’insupportable. Pourtant, elle ne pouvait s’empêcher de boire, encore et toujours plus. Parfois elle se disait que dans deux ans au grand maximum elle serait alcoolique et qu’elle finirait à St Mangouste en cure. Ça ne la réjouissait pas franchement, mais elle ne s’imaginait pas non plus s’amuser sans alcool. C’était un peu comme lui demander de boire du café sans café. Complètement stupide et sans intérêt.
Après avoir vaguement somnolée elle entendit et sentit qu’autour d’elle les filles s’animaient. Des conversations autour d’elle, des portes qui s’ouvraient et se fermaient. Elle en entendit deux qui parlaient d’elle. Ça donnait quelque chose du genre des exaspérations du fait qu’elle sortait encore et toujours. De toute façon elle n’était jamais contente. Elle ouvrit les paupières.

* Encore ces deux mégères … *

Elles c’était quelque chose de sacré, jamais l’une sans l’autre, et toujours à jacter sur les autres. Elles mériteraient des claques. Et si ça devait arriver un jour, Heaven serait certainement la première à leur balancer sa main dans leur joli visage. Elle regarda l’heure. Huit heures. Elle devait aller en cours, mais son corps ne répondait pas. Tout comme sa tête. Elle préférait rester dans son lit. Elle ne débâtit pas plus longtemps sur le sujet. Elle se mit sous sa couette et referma l’œil. Elle allait sécher la matinée. Et puis entre aller en cours avec la gueule de bois, et dormir pour estomper un peu cette gueule de bois, elle préférait rester dans son lit. Elle resta donc là à dormir durant quatre heures de plus. A midi elle se décida enfin à lever le pied du lit. D’un pas nonchalant elle se dirigea vers les douches, et y fit couler une eau brulante. Elle serait bien resté l’après midi sous la douche, mais elle devait aller en cours. Sécher la matinée passait, mais toute la journée ça en devenait peu plausible. D’ailleurs il fallait qu’elle se trouve une excuse.

* j’irai à l’infirmerie, prétextant que j’ai vomie toute la matinée … ce qui n’est pas totalement faux j’ai du gerber deux fois dans la matinée … je ne pouvais pas sortir et tout ça. Sinon j’irai voir la concierge et elle me fera une excuse sans problèmes. *

Au bout d’une demi-heure elle avait enfin réussit à retrouver une apparence convenable. Elle descendit de son dortoir. Si un élève la croisait il n’aurait pas pensé qu’elle avait veillé toute la nuit et qu’elle avait la gueule de bois. Justin l’attendait en bas. Avait-il sécher lui aussi ? Il ne semblait pas non. Il était moins amoché qu’Heaven lorsqu’ils s’étaient réveillés dans la Salle Commune. Il lui souriait et tenait une lettre dans sa main gauche, la tendant vers elle. La demoiselle fronça les sourcils.

- Tu as du courrier.
- Vraiment ? Peut-être le Barman ?

Elle sourit à cette idée. Elle s’empressa de l’ouvrir tout en marchant avec Justin pour se diriger vers leur premier cours de l’après midi. Lorsqu’elle lu les lignes elle ne compris pas grand-chose. Elle ne comprenait pas le motif de l’expéditeur déjà. Justin la tira de ses pensées pour qu’elle explique le contenu du hibou. Elle lui expliqua, il sourit. Il savait, mais Heaven était complètement perdue.

- Tu sais quelque chose non ?

Il ne dit rien. Et son silence avait le don d’énerver la Serpentard. Depuis son accident il se refusait de lui révéler certaines brides de son passé, de ce qu’elle avait oublié. Il jouait avec elle comme un chat joue avec une pelote de laine. Elle ne lui adressa pas la parole de l’après midi. Elle aurait pu essayer de lui tirer les vers du nez ça oui, mais elle avait l’habitude et au final elle ne gagnait jamais. Elle relit la lettre au moins une dizaine de fois, et se tortura l’esprit pour savoir ce qu’il voulait. Timothé Smith. Elle avait déjà couché avec lui, mais rien de plus. Ils ne s’étaient jamais vraiment adressé la parole.

* Peut-être qu’il veut remettre ça … *

C’était la seule raison qu’elle trouvait au problème. Au dernier cours elle fut la dernière à sortir. Elle ne savait pas si elle devait y aller ou non. Quelque chose lui disait que c’était un piège, mais sa curiosité était piquée. Elle voulait savoir ce qu’il y avait derrière tout ça. Justin connaissait certainement mieux Timothé qu’Heaven, c’était peut-être pour ça qu’il avait sourit lorsqu’elle lui avait lu la lettre. Sans vraiment s’en rendre compte elle s’était rendue vers la Cabane d’Hagrid. Elle n’avait jamais mis les pieds ici depuis son accident. Elle trouvait cet endroit louche. Elle rangea le hibou dans son sac, et poussa doucement la porte de la cabane. C’était poussiéreux, les toiles d’araignées étaient extrêmement importantes, surtout hideuses. Le Serdaigle était là, lui aussi.

- Tu es venue…
- Tu veux quoi au juste ? C’était quoi ce hibou ? Si c’est pour te foutre de moi je n’ai pas que ça à faire Smith. Et pourquoi cet endroit ? C’est répugnant !

En la voyant entrer dans cette vieille cabane poussièreuse, Timothé eut l'impression d'apercevoir une princesse au beau milieu d'un bidonville. Disons que le statut social de sa famille était bien connu à Poudlard, de même que dans toute l'Angleterre, et il avait été très difficile pour le serdaigle de se montrer à la hauteur de cette richesse tout au long de leur relation. L'ancienne Heaven avait essayé tant bien que mal de le raisonner, de lui faire comprendre qu'elle se fichait éperdumment qu'il provienne d'une famille modeste, mais ça n'avait pas empêché le jeune homme de se sentir mal à l'aise face à cette réalité. Et s'ils étaient restés ensemble plus longtemps encore, il en serait probablement au même point de non-retour. Ça avait très certainement joué un rôle dans sa rupture avec Heaven et il se demandait si finalement, il s'était séparé d'elle uniquement à cause de ça. Parce que le jour où ils avaient rompus lui paraissait tellement iréel, tellement douloureux que Timothé se posait encore des questions aujourd'hui. Peut-être était-il toujours amoureux d'elle ? Mais Julia alors dans tout ça, quel rôle jouait-elle ? Le septième année y avait souvent réfléchi et en était toujours venu à la même conclusion: Si Heaven le troublait encore, c'était parce qu'elle semblait avoir complètement oublié leur relation, et qu'elle ne lui avait pas laissé le temps de remettre les choses au clair dans sa tête avant de le blesser. Et à l'époque ça lui avait fait mal de s'apercevoir que la fille qu'il avait le plus aimé, la fille pour qui il avait rompu avec sa petite-amie, la fille avec qui il s'était longtemps vu finir ses jours... l'oublie. Et dans le cas de la serpentard, ça n'avait pas été une tentative d'oubli peu efficace, non... n'ayant jamais fait les choses à moitié, elle l'avait effacé entièrement de sa mémoire, jusqu'à ne plus connaître son nom. Et son nom, elle le connaissait depuis la première année. C'était beaucoup trop étrange aux yeux de Timothé pour qu'il accepte la situation. Surtout si ne pas savoir la cause de cet oubli soudain l'empêchait de bien vivre sa nouvelle relation avec Julia. Il DEVAIT connaître la réponse, et ça se ferait aujourd'hui. Peu importe si elle le snobait ou pas, peu importe si le ton qu'elle employait agissait comme un poignard qu'elle lui planterait dans le dos. Peu importe l'état dans lequel il partirait d'ici, le serdaigle voulait savoir. Et il saurait, sans aucun doute.

FLASH BACK

Le bal de Noël avait été grandiose. Il y était allé avec Heaven, mais ça ne s'était pas vraiment passé comme ils l'avaient espéré. Le couple avait malgré tout passé une assez belle soirée, remplie de rires et de bonne humeur et rien ne pouvait vraiment faire perdre à Timothé son sourire, sauf la perspective de croiser Heaven le lendemain. Il avait reçu son hibou au déjeuner et se doutait bien de ce que serait le principal sujet de conversation. Le serdaigle n'était pas dupe après tout, il avait remarqué que leur couple battait de l'aile et lui-même ne se forçait plus pour régler leurs problèmes. Son coeur ne battait plus aussi vite lorsque la serpentard glissait sa main dans la sienne, et leurs baisers n'étaient plus aussi essentiels, aussi brûlants de désir. On aurait dit que la flamme était définitivement éteinte, et aucun d'eux ne semblait prêt à fournir les efforts nécessaires pour faire renaître leur amour autrefois si puissant et si jalousé des autres élèves. Tous auraient voulu que leur couple soit aussi bien assorti et aussi solide que Timothé et Heaven, mais dorénavant on ne pouvait plus dire d'eux qu'ils étaient faits l'un pour l'autre. Et les paris avaient recommencé plusieurs semaines auparavant, portant cette fois-ci sur le temps qu'ils mettraient avant de rompre. Certains étaient d'avis qu'ils feraient ça avant les vacances, d'autres croyaient que des âmes soeurs ne pouvaient pas se séparer et que leur réconciliation n'était qu'une question de temps. D'autres pensaient que Timothé et Heaven feraient comme tant d'autres couples et rompraient, puis se remettraient ensemble, jouant à ce petit jeu jusqu'à ce qu'ils s'en lassent pour de bon. Ça amusait le cinquième année presqu'autant que ça l'attristait... de voir que même de parfaits inconnus l'encourageaient à la quitter. Leur couple allait si mal ? Il aurait été tenté de dire que non, mais il aurait alors été le seul à croire ça.

Il attendait Heaven dans la cabane de Hagrid, le seul lieu où ils étaient pratiquement certains de ne pas se faire déranger. Ils y venaient lorsqu'ils avaient des trucs à régler, et cela depuis le début de leur relation. Portant toujours son uniforme aux couleurs de sa maison, il patientait, essayant de se changer les idées. Retourner à la maison était une perspective réjouissante... il allait passer, comme d'habitude, les vacances de Noël à faire des bêtises avec Eloïse et Amanda, envoyer des hiboux à Maximilien pour lui raconter toutes ses aventures, donner de ses nouvelles à Laura par le biais de lettres anonymes, question que Baël ne soit pas au courant de leur amitié secrète. Il savait pertinemment que son été serait la même qu'avant, que rien n'aurait changé... et c'était peut-être ça qui le troublait un peu. C'était un peu comme si sa relation avec Heaven n'aurait rien changé, que ça ne ferait pas de son été quelque chose de plus sombre, ou de plus lumineux. Rompre avec elle avant les vacances signifiait que son Noël serait exactement le même que les prédédents, et peu à peu il oublierait Heaven. La serpentard arriva finalement, elle aussi rayonnante dans son uniforme d'étudiante. Ils discutèrent un moment, puis en vinrent à la conclusion que ni l'un ni l'autre n'avaient encore les mêmes sentiments qu'un mois auparavant. Ils se laissèrent en bons termes, se promettant de ne garder aucun sentiment négatif vis à vis de l'autre et devenir, même si ça prendrait du temps, de bons amis. Car malgré l'amour qui manquait dorénavant à l'appel, Heaven et Timothé s'entendaient toujours très bien et appréciaient les moments passés ensemble.

Même après que les vacances de Noël eurent tiré à leur fin et que Timothé soit revenu à Poudlard, frais et reposé, sa relation avec Heaven resta au beau fixe. Ils se saluaient brièvement dans les couloirs, mais ne se parlaient pas et évitaient de rester trop longtemps l'un près de l'autre. Peut-être le malaise était-il trop présent encore pour qu'ils soient vraiment aptes à bâtir une amitié. Ils devaient se laisser du temps, ne pas précipiter les choses, car ça pourrait mal se terminer. Et la dernière chose dont il avait envie, c'était bien se disputer avec la fille qu'il avait le plus aimé jusqu'à ce jour. Mais c'est en Mars que tout changea. Heaven "disparu" de Poudlard, et il ne la revit qu'à la rentrée suivante. Ces mois sans elle lui avait permis de passer à autre chose, et Timothé était maintenant prêt à lui parler normalement de nouveau. À la fin du banquet de bienvenue pour les nouveaux élèves, il l'aperçut, sa longue chevelure brune flottant derrière elle. Il s'approcha et la salua, mais le regard qu'il obtint en échange fut si déroutant qu'il recula de quelques pas, bouleversé. La Heaven qui venait de le regarder semblait froide et cruelle, et surtout, elle l'observait comme s'il n'était qu'un vulgaire élève comme les autres.

« Heaven... tu vas bien ? Tu ne venais plus en cours... »
« Et t'es qui au juste ? Un camarade de classe ? »
« Quoi ? Je... je suis... un camarade, c'est ça. J'espère que tu te portes bien dans ce cas. Bon, à plus ! »

FIN DU FLASH BACK

Ce qu'il avait ressenti à ce moment était la douleur la plus intense de sa vie. Il n'avait pas compris une seule seconde pourquoi Heaven semblait l'avoir oublié à ce point, c'était si soudain, et surtout si cruel ! Elle qui lui avait dit, tout au long de leur relation, qu'il était son premier amour, que jamais elle n'oublierait les moments passés tous les deux... et la voilà qui le toisait de haut en bas comme s'il avait été n'importe quel autre élève. Chose qu'elle faisait à ce moment même, deux ans plus tard. Et ça lui faisait toujours aussi mal. Ils avaient même couché ensemble, après une soirée un peu trop arrosée... et elle ne s'était souvenu de rien. Son comportement avec lui n'avait pas changé d'une miette après cette nuit, et Timothé commençait à en avoir assez. Il se leva à son arrivée, et sa colère devait se voir un peu, même s'il tentait le plus possible de rester calme. Après tout, il y avait peut-être une explication logique à tout ça.

« Tu veux quoi au juste ? C’était quoi ce hibou ? Si c’est pour te foutre de moi je n’ai pas que ça à faire Smith. Et pourquoi cet endroit ? C’est répugnant ! »

« C'est plutôt toi qui te fous de moi Heaven ! Comment as-tu pu me faire ça ? Pourquoi tu joues à ce jeu stupide ? Tu m'as vraiment oublié ? Lors de notre rupture, on s'était promis... de ne jamais se disputer, de rester en bons termes. Mais ça ne voulait pas dire me renier du jour au lendemain ! Tu disparais sans aucune explication durant six mois et tu reviens complètement changée ! Pourquoi ? Je pense que tu me dois des explications, après tout ce qu'on a vécu tous les deux. »

Après avoir terminé de parler, Timothé s’était fait silencieux, préférant être attentif à la réponse d’Heaven. Il savait qu’il y était allé un peu brusquement, mais il devait savoir… aucune autre issue était possible, le serdaigle en était pleinement conscient. Chaque fois qu’il embrassait Julia, chaque fois qu’il lui prenait la main, le visage souriant de son ex petite-amie lui revenait en tête, tournant en boucle dans son esprit, l’empêchant de profiter pleinement des moments avec la fille qu’il aimait. Timothé ne détestait pas Heaven, jamais il ne le pourrait d’ailleurs. Ce qu’ils avaient vécu était puissant, extrêmement puissant... la première fille à qui son cœur avait appartenu sans gêne et sans retenue. Le jeune homme s’était donné à elle comme il n’aurait jamais osé le faire avec quiconque. Et quelques mois plus tard, elle lui balançait son ignorance en pleine gueule, sans qu’il n’ait rien fait de mal. Est-ce qu’on avait dit un truc à Heaven, lui avait-ton menti ? Est-ce qu’elle avait été blessée, et elle se protégeait donc de la douleur en ne lui parlant plus et en niant leur histoire ? Charlotte avait refusé de raconter à Timmy ce qui s’était passé, et le meilleur ami d’Heaven aussi s’était contenté de rester muet comme une carpe en affichant un sourire énigmatique qui avait fait rager le garçon. Il préféra se rasseoir, luttant contre l’envie de lui foutre une claque pour la réveiller, ou bien alors partir en courant. S’enfuir était une solution vraiment tentante, mais malgré toute sa crainte face à cet affrontement, Timothé DEVAIT entendre les explications de la Serpentard. Sinon, jamais il ne pourrait passer à autre chose et vivre son histoire avec Julia sans remords. Il passa une main hésitante dans ses cheveux bruns, soupirant légèrement. Elle semblait chercher ses mots… il l’avait déstabilisé et il le savait.

« Des explications … ça dépend sur quoi. Mais on a vécu quoi tous les deux ? Je ne me souviens … »

Relevant brusquement la tête, Timothé se fit violence pour ne pas exploser de rage. Qu’avaient-ils vécu tous les deux ? Heaven était réellement en train de poser cette question? La première fille pour qui il avait tout abandonné, la première fille à qui il avait fait assez confiance pour lui offrir son corps tout entier, et son âme encore plus. Il l’avait aimé, plus qu’il n’avait jamais aimé quelqu’un. Pour cette fille, Timothé aurait absolument TOUT fait. Il aurait renié sa famille, ses amis, Poudlard, son avenir, le Quidditch, tout. Bien sûr, leur amour avait fini par s’estomper, mais de là à oublier ce qui s’était passé et faire semblant de ne se souvenir de rien, c’était trop. Trop pour que le septième année puisse le supporter. Ça faisait déjà presque deux ans qu’il endurait cette souffrance sans jamais avoir le courage et la volonté d’affronter Heaven pour de bon. Sauf que voilà, ce jour était arrivé et il ne quitterait pas cette cabane avant de tout savoir en détails.

« Je ne me souviens de rien. Il me manque cinq ans de ma mémoire : mes cinq premières années à Poudlard. J’ai eu un accident en Janvier de ma cinquième année. Je suis tombée du haut de la tour d’astronomie, quelqu’un m’a poussée. J’ai échappé à la mort, mais pas à l’oubli. En oubliant j’ai changé. Je sais que j’étais différente d’avant, mais aujourd’hui c’est comme ça que j’aime vivre, c’est moi. J’ai pu me souvenir de tout ce que j’avais appris, c’est revenu par flash-back, mais, en ce qui concerne mes relations, j’ai tout perdu. Il n’y a que ceux que je connaissais d’avant mon accident que j’ai pu me souvenir facilement. J’en avais même oublié ma meilleure amie … »

Timothé dut se retenir fermement à la petite table à côté de lui pour ne pas tomber. Le choc était plus fort que ce à quoi il s’était attendu tout ce temps. Bien entendu, il s’était inventé toutes sortes de scénarios possibles, mais jamais le jeune homme ne s’était imaginé un truc aussi improbable. Pourtant, ça semblait être la vérité. Il pouvait le lire dans les yeux d’Heaven, il la connaissait par cœur après tout. Tombée du haut de la tour d’Astronomie, car quelqu’un l’avait poussée ? C’était incroyable, il n’arrivait pas à y croire même si c’était la triste réalité. Qui lui en voulait à ce point à ce moment-là ? Heaven n’était qu’une adolescente comme les autres, qui venait de rompre avec son petit-ami, qui ne cherchait pas d’histoires. Tout d’un coup, sa nature protectrice repris le dessus sur sa colère envers la septième année, et Timothé eut tout de suite envie de la serrer dans ses bras et de lui dire qu’elle lui avait manqué. Alors elle avait même oublié Charlotte, sa meilleure amie depuis la première année à Poudlard… ça, ça voulait dire qu’il était assez normal qu’elle l’ait oublié lui. Timothé sentait les larmes monter jusqu’à ses yeux, et il devait se concentrer intensément pour les empêcher de couler Montrer à Heaven à quel point ça lui faisait mal était hors de question. Il avait souffert déjà beaucoup plus qu’il ne l’aurait cru, et si en plus elle se moquait de lui, ça serait la goutte qui ferait déborder le vase. La pauvre semblait pourtant complètement déboussolée, comme si elle tentait en vain de se rappeler de lui et de leur histoire. De la voir comme ça fit encore plus mal à Timothé, qui se rendait compte qu’il aurait du aborder le sujet plus tôt avec elle… sauf qu’elle n’aurait peut-être pas été prête à ce moment-là et se serait montrée très méchante aussi, par souci de protection. Le jeune homme était tellement ébranlé par cette annonce qu’il avait plongé des yeux étonnés dans ceux d’Heaven. Oublier tout du jour au lendemain devait être une épreuve absolument insupportable, et terrifiante.

« C’est ça que tu voulais savoir non ? Il y a que ceux dont je suis vraiment proche qui savent ça. Je ne l’hurle pas sur tous les toits. Mais avec toi … on … on est sorti ensemble ? Pourquoi tu ne m’en as pas parlé plus tôt ? Tu m’aimais ? Je … »

Timothé s’était levé d’un seul bond et c’était précipité vers Heaven pour la prendre dans ses bras avec force. Oubliant tout, de son désir de lui crier dessus jusqu’à Julia qui n’avait aucune idée de ce qui se passait dans cette cabane… il n’avait qu’un seul désir à ce moment, et c’était de régler tout ça une bonne fois pour toutes, et montrer à la Serpentard qu’il ne lui en voulait pas d’avoir changé, que ce n’était pas sa faute. Même si le Serdaigle aurait préféré qu’ils se disputent et qu’elle finisse par lui dire qu’elle le détestait et que plus jamais elle ne voulait le revoir, car ça aurait été moins pénible. Moins pénible que d’apprendre qu’il avait souffert, seul et en silence, durant deux ans pour se rendre compte qu’en fait, c’était Heaven qui avait eu le plus mal. Le garçon ne disait plus un mot et se contentait de serrer Heaven tout contre lui, comme au temps où ils sortaient ensemble. Ce geste n’était plus amoureux, car il ne l’aimait plus et le savait. Mais il avait eu besoin de le faire, car malgré tout, Timothé aimait encore Heaven mais d’une toute autre manière. Il se souciait d’elle, et n’aimait pas la voir triste. Il ne voulait plus la lâcher, de peur qu’elle s’enfuie, et même si elle trouverait probablement ce geste étrange et inapproprié, il s’en fichait éperdumment.

« Jamais je n’aurais pu savoir, je… personne ne voulait me dire quoi que ce soit. Tu avais tellement changé que je n’osais pas t’en parler… je vais te raconter. »

C’était d’une voix réconfortante et attentive que Timothé avait parlé à Heaven. La même voix qu’il avait utilisé depuis toujours avec elle, celle que la jeune fille avait toujours apprécié. Décidant finalement de lâcher son emprise sur son ex, il lui pris cependant la main et s’assit à côté d’elle. Ce contact l’aiderait probablement à tout raconter sans s’arrêter. Timothé respira un bon coup, ne lâcha plus Heaven des yeux et commença son récit.

« Toi et moi, on se connaît depuis notre premier jour à Poudlard. Tu étais si belle, même à onze ans, que déjà tu faisais tourner des têtes. Je me souviens encore de la première fois où je t’ai aperçue. J’en ai perdu mes moyens… à l’époque on ne se parlait pas beaucoup. Puis en quatrième année, on a commencé à se rapprocher. Qu’aurais-je pu faire à part tomber amoureux de toi ? Tu étais la première fille que j’aimais autant, tu as été la première dans tous les aspects… on s’aimait, on était inséparables, et tous étaient d’accord pour dire qu’on formait le couple le plus mignon de Poudlard. On est resté ensemble plusieurs mois, puis on a commencé à s’éloigner, petit à petit. Je ne sais pas pourquoi ni comment nous en sommes arrivés là. Entre nous, pourtant, c’était l’amour fou. Mais on s’est quittés, tout en se promettant de prendre soin l’un de l’autre encore même si l’amour n’était plus présent. C’est à peine quelques semaines plus tard que tu as disparue. Tu n’imagines pas à quel point j’étais inquiet… et lorsque tu es revenue, je suis immédiatement venu te demander de tes nouvelles, mais tu m’as ignoré complètement. Ça m’a fait le même effet d’un coup de poing en pleine figure… à l’époque je ne t’aimais plus, mais je n’arrivais pas à t’oublier, et je me souciais encore de toi, autant qu’aujourd’hui. C’est probablement pour ça que j’ai eu besoin de coucher de nouveau avec toi… tous les moyens de te sentir près de moi étaient bons. Je ne pensais pas que… tu m’avais réellement oublié. Je suis désolé de ne pas te l’avoir dit avant, mais j’avais si mal… »