Les yeux grands ouverts sur le monde, Fleya était assise dans l’un des fauteuils confortables de la salle commune des Poufsouffles. Un livre de potion ouvert sur les genoux, elle tournait les pages, ses doigts saisissant mécaniquement les fines et vieilles feuilles du bouquin qu’elle avait emprunter à la bibliothèque, sans même plus faire attention à l’écriture à moitié effacée que l’on pouvait y déchiffrer. Ses grands yeux gris étaient occupés par d’autres visions… D’autres faits beaucoup plus « intéressants » que d’apprendre comment découper un scarabée d’Egypte mort depuis trois mois au minimum.

Ces « faits » n’étaient en fait rien d’autres que l’ouverture du passage qui séparait la salle commune et les quartiers des poufsouffles au reste de Poudlard. Toutes les 10 ou 15 secondes, la porte s’ouvrait sur un, deux ou trois élèves. Et plus le temps passait, plus les rentrées se faisaient fréquentes. Les sorties étant devenues rares, la capacité de la salle ne cessait de s’accroître. Les gens affluaient sans partir. Certains investissaient leurs dortoirs, malheureusement la plupart préféraient rester au coin du feu… Ce qui faisait que Fleya n’avait plus du tout envie de rester là. Le monde commençait à étouffer la jeune fille qui s’était installée là une demi-heure plus tôt, se disant peut-être qu’elle allait pouvoir rester seule et tranquille dans un coin de la salle. Mais la situation avait vite changé... Alors, refermant presque trop sèchement le livre qu’elle feuilletait donc, faisant par la même occasion, sursauter deux jeunes deuxième années qui s’étaient installés non loin, elle le glissa dans son sac et quitta le fauteuil. Ce dernier ne resta pas inoccupé très longtemps… Elle était à peine arrivée à la porte qu’un quatrième année l’avait déjà pris d’assaut.

Quelques minutes plus tard, Fleya déambulait dans les couloirs. Elle n’avait pas vraiment d’endroit où aller. L’après-midi était morne et pluvieuse. Personne n’osait mettre un pied dehors. Elle serait bien sortie, malgré le temps, si jamais être trempée par la pluie pouvait changer quelque chose à ses problèmes. Mais attraper une pneumonie n’arrangerait rien, bien au contraire.

Ils étaient plus ou moins déserts, les couloirs… De temps en temps, elle rencontrait un groupe ou l’autre, peu de connaissances. En même temps, ce n’était pas comme si Fleya connaissait beaucoup de monde… Mais elle finit par tourner dans l’un des couloirs des cachots lorsqu’elle tomba enfin sur des visages connus… Connaître des gens ne veut malheureusement pas dire « avoir envie de les voir ». Eux étaient à mi-chemin de l’autre bout du boyau de pierre, et ils lui tournaient le dos. Mais à leurs écharpes vertes et à leur carrure, elle savait parfaitement qu’elle n’avait aucune envie de croiser leur regard. Son cœur manqua, de plus, un bond lorsqu’elle finit par reconnaître la démarche et les épaules de Seeley dans le lot.

Seeley… Ils ne s’étaient pas vraiment revus et ne s’étaient surtout pas encore reparlés depuis… depuis la dernière fois. Et la jeune fille, si elle n’avait pour une fois rien fait pour l’éviter, n’avait pas non plus cherché à le revoir seul à seule. Elle évitait de repenser à ce qui s’était passé pour l’instant. Elle avait besoin de réfléchir, de faire le point et de comprendre… Et surtout pas de le revoir alors qu’il était entouré de ces serpents venimeux… Elle avisa donc bien vite la porte d’une salle toute proche. Priant pour qu’elle ne soit pas verrouillée, elle tourna la poignée pour se cacher derrière le pan de bois. Et pour une fois, la chance lui sourit aujourd’hui.

Le groupe passa donc son chemin sans même avoir conscience de la fugace présence de la jaune et noire qui s’était finalement installée sur une chaise de la pièce. Car en attendant que les serpentards et le gryffondor s’en soient allés, elle avait fouillé la pièce du regard, et ce qui l’avait frappée avait été le calme régnant ici. La pénombre et le silence… Pas de pluie martelant les carreaux, pas d’élèves bruyants et babillards… Il n’y avait juste qu’un peu de poussière pour ternir le tableau. Mais c’était un détail si futile qu’elle passa facilement outre.


Enfin seule… Un soupir qui s’échappe de ses lèvres tandis qu’elle se détend un peu et s’installe plus confortablement. Sa cape la protégeait du froid. Par-dessous, elle avait enfilé un haut blanc et une jupe noire, ample. Habits communs qu’elle portait souvent. Elle ne cherchait pas à attirer les regards des autres. On la critiquait souvent sur sa tenue… et elle s’en foutait bien. En bref, elle n’avait rien de commun avec ces filles qui s’habillaient toujours au top de la mode, ces filles entourées de garçons et qui avaient souvent la réputation de « filles faciles » ou encore « Marie couche-toi là ». Très loin d’être populaire, sa situation à elle lui plaisait très bien !

Mais de nouveau, sa solitude fut de courte durée. A peine cinq minutes après qu’elle se soit installée, des pas s’approchèrent de la porte… qui finit par s’ouvrir, évidemment… sur une silhouette trop grande et trop large pour être celle d’une jeune fille qu’elle connaissait. Evidemment… Mais à vrai dire, elle fut étonnée de reconnaître le jeune homme qui venait d’entrer. Enfin, reconnaître était un bien grand mot… Elle ne connaissait Liam Storm que de nom, un nom qu’on murmurait de temps en temps dans la salle commune des Poufsouffle, surtout de la part de filles un peu trop superficielles à son goût. Qu’est-ce qu’un Gryffondor ( autre que Seeley ) pouvait bien faire dans les cachots à cette heure-ci ? Surtout quand ce Gryffondor était réputé pour avoir pleins d’amis. Enfin… Elle n’aimait pas juger trop vite non plus. Surtout lorsqu’elle ne connaissait absolument pas la personne qu’elle avait en face d’elle…

« Salut… » Répondit-elle, après qu’il ait fermé la porte derrière lui, tandis qu’il lui adressait un sourire des plus … étranges.

On ne pouvait pas le nier… Liam était séduisant, attirant et très mignon. Il avait une carrure et une prestance enviable. Il n’était le genre de garçon faisant partie du décor, lui. On ne l’envisageait jamais comme une option de second plan, ou encore comme un « remplaçant pour cœur brisé »… Mais ce sourire n’était pas du genre à faire flancher Fleya dans ses bras. La jeune fille se tendit, ne quittant pas sa chaise et le fixant, cherchant à déceler sa prochaine réaction, à fuir à la première approche ou encore à lui dire de sortir au premier geste ou mot supplémentaire qu’il pouvait bien faire…