[Priorité à Amanda Miller]

FLASH BACK

Deux enfants se promenaient main dans la main, montant sans se presser la petite côte menant à la rue où ils habitaient depuis leur plus jeune âge. Ils connaissaient le quartier comme le fond de leur poche, mais cet après-midi là n’était pas comme les autres. C’était un événement spécial. Cette journée-là, ils partaient en camping… pas tous seuls, bien évidemment. Leurs familles respectives seraient de la partie, mais ils auraient tout le temps nécessaire pour s’amuser et concocter leurs plans farfelus durant cette longue semaine de vacances. Excités à la simple idée de s’asseoir dans la voiture et de chanter à tue-tête toutes les chansons dont ils savaient les paroles, Timothé Smith et Amanda Miller jubilaient. On aurait dit qu’ils se réveillaient un matin de Noël, découvrant la quantité phénoménale de cadeaux au pied du sapin qui les attendaient. L’école n’avait jamais parue aussi interminable. N’étant même pas dans la même classe, Tim étant son aîné d’un an, ils n’avaient pas eu l’occasion d’en discuter durant la classe, gardant leur impatience pour eux. Mais dès que la cloche annonçant le début de l’été avait résonné un peu partout dans le bâtiment, les deux inséparables avaient ramassé leurs choses à une vitesse impressionnante pour vite se retrouver, comme d’habitude, devant l’école pour rentrer ensemble.

Timothé et Amanda avaient toujours été amis. Leurs familles ayant toujours eu d’excellents contacts, il était normal qu’ils se soient côtoyés dès leur plus jeune âge. Grandir avec quelqu’un représentait quelque chose d’énorme. Les liens se tissaient vite, si bien que tout le quartier disait qu’un jour, ils s’épouseraient et fonderaient une famille. Cependant, les enfants voyaient cela d’une manière différente. Ils se considéraient comme les meilleurs amis du monde. De vrais jumeaux identiques. Ils ne se ressemblaient pas du tout, ni physiquement, ni mentalement, mais jamais on ne les voyait séparés plus d’une journée consécutive. Lorsque le garçon partait en voyage avec sa famille, il n’y allait pas sans Amanda. Et c’était réciproque. La vie l’un sans l’autre leur était inconcevable. Pour Timothé, le monde signifiait ceci : Amanda, Eloïse, son papa, sa maman, son hamster Neil et ses livres. Le reste lui importait très peu. Il n’avait besoin que de ça pour se sentir heureux.

« On se voit tout à l’heure Timmy ? »
« Je vais porter mon sac chez-moi et je te rejoins ensuite. On va bien s’amuser ! »
« Mes parents vont mettre le CD des Eagles durant tout le voyage, ils ont promis ! »
« Super ! À plus ‘Manda ! »

Le garçon lâcha à regret la main de son ami et continua le court chemin qui le séparait de sa propre demeure. Cette semaine de camping resterait inoubliable, il en était certain. Il se dépêcha de se rendre à sa chambre pour y déposer son sac et sortir un peu Neil de sa cage, car son petit rongeur allait lui manquer terriblement et il ne se serait pas pardonné d’être parti sans lui dire au revoir. D’ailleurs, il ne comprenait pas pourquoi ses parents refusaient qu’il l’emmène avec eux… les hamsters devraient aimer la forêt non ? Il comptait bien leur poser la question un de ces jours, lorsqu’il y repenserait. Après avoir serré très fort sa petite sœur dans ses bras, Timothé dit au revoir à Norman et Jeanne et fila chez Amanda. Ne voulant pas faire le trajet de deux heures chacun dans leur propre voiture, les familles avaient consenti à mettre Amanda et Tim avec les Miller, puis Eloïse, le frère et la sœur d’Amanda avec les Smith. À cette époque, aucune magie ne venait briser l’harmonie de la famille de la petite blonde, encore loin de tout souci. Timothé était déjà au courant de ses pouvoirs magiques ainsi que ceux de sa mère, mais il avait juré de ne rien dire à quiconque, même si c’était Amanda. Et il tiendrait parole, car une promesse était une promesse. Pas question de trahir sa mère, et surtout de créer un froid entre sa meilleure amie et lui. Ses parents n’ayant pas de pouvoirs magiques, le garçon était donc convaincu qu’Amanda n’en aurait jamais elle non plus. Mais comme le destin fait parfois bien les choses…

« Je suis Peter Pan, alors je ne grandirai jamais ! »
« C’est pas juste que tu sois Peter Pan ! Moi je suis qui alors ? »
« Hummm… la Fée Clochette ? Tu es aussi petite, et aussi blonde ! »
« Mais pas aussi vieille ! On pourrait pas jouer des personnages moins vieux ? Peter Pan doit bien exister depuis 500 ans ! »
« Bon d’accord… on joue aux pirates ? »
« Timmy… on a joué hier. On a joué à la guerre, aux astronautes, aux pirates, aux agents secrets, aux animaux sauvages, aux magiciens… »
« Raaaaah, si tu étais un garçon ce serait moins compliqué ! »
« Je serais bien moins jolie si j’étais un garçon ! Beurk, je te ressemblerais peut-être ! »
« T’es pas drôle ‘Manda ! Je croyais que tu étais ma meilleure amie… traîtresse ! »
« Je suis ta meilleure amie pour la vie, c’est une promesse. Peu importe si ta tronche me rappelle celle du bouledogue des Owens… »
« Et la tienne celle du caniche de Marco Rivers… je vais t’aimer toute ma vie ‘Manda ! Promis ! »

FIN DU FLASH BACK

Timothé se réveilla en sursaut. C’était le moment décisif. Aujourd’hui, il reverrait Amanda et lui parlerait. Il n’acceptait pas que leur amitié en soit réduite à une ignorance complète et totale. Il connaissait cette fille depuis toujours… ils étaient tellement faits pour s’entendre que la vie avait décidé d’octroyer des pouvoirs magiques à Amanda pour qu’elle le suive à Poudlard… enfin, ça c’était ce que Timothé voulait bien croire. Il aimait croire que c’était le destin qui avait décidé de faire de sa meilleure amie de toujours une sorcière. Comment expliquer alors qu’elle soit la seule de la famille à être là ? Leur amitié, autrefois indestructible, avait été anéantie par un geste si anodin que ça en devenait presque frustrant.

Un baiser. Un simple baiser. Un tout petit baiser avait réussi à détruire le lien le plus puissant de ce monde : l’amitié de Timothé Smith et d’Amanda Miller. Les deux petits démons au visage d’ange. Les siamois. Les « amis pour la vie ». Comment en étaient-ils arrivés là ? Le serdaigle n’aurait même pas su le dire. C’était arrivé tout bêtement, un après-midi où ils s’étaient retrouvés sous un arbre du parc. Il faisait beau, il faisait chaud, le soleil se couchait à l’horizon. Disons que c’était assez romantique et que ça avait probablement joué un rôle dans ce baiser si soudain. La poufsouffle s’était approché de Timothé et l’avait embrassé sur les lèvres. Si ça avait été sur la joue, sur le front, dans le cou, ou encore sur le torse, ça n’aurait rien signifié de plus que d’habitude. Ils étaient si proches et se connaissaient si bien que les marques d’affection entre eux étaient fréquentes et anodines. Mais un baiser sur les lèvres n’était pas rien, ni pour elle, ni pour lui. Instinctivement, pour protéger leur amitié, le jeune homme l’avait brusquement repoussée. Ce n’était pas parce qu’il ne l’aimait pas, ou parce qu’il n’avait pas apprécié ses lèvres sur les siennes… en fait c’était tout à fait le contraire. Il l’avait repoussée parce qu’il avait trop aimé ce baiser. Timothé avait eu peur de tomber amoureux d’elle. Côtoyer Amanda tous les jours était devenu une habitude. Ça faisait parti de sa vie, c’était un fait indiscutable. Mais il ne voulait pas sortir avec elle, qu’ils deviennent un couple. Car si ça ne durait pas, plus jamais ils ne pourraient être les meilleurs amis du monde. Rien ne serait comme avant.

Il n’avait pas pensé que ça aurait pu vexer Amanda autant. Après tout, si elle l’avait embrassé, c’était probablement qu’il y avait une raison. L’aimait-elle plus qu’elle l’avait laissé croire jusqu’à présent ? Ou pour elle, leur relation lui semblait-elle être la même qu’un couple normal et donc, ce baiser lui avait paru normal également ? C’était à n’y rien comprendre. Il avait eu beau lui crier de revenir, qu’il allait s’expliquer, qu’il n’avait pas voulu la repousser aussi brutalement, c’était fini. Rien à faire. Elle était partie. Pour de bon cette fois. Depuis, plus aucun regard, plus aucun sourire. Plus de longues heures passées ensemble à rigoler, à se serrer dans leurs bras, à se chamailler… pour Timothé, c’était une vraie torture. Mais ayant peur d’affronter Amanda, il avait enduré ce supplice trop longtemps. Et la veille, il en avait eu assez.

Il s’était levé le matin avec une seule idée en tête : envoyer un hibou à Amanda et lui donner rendez-vous au bord du lac. Le lac, l’endroit qu’il détestait le plus au monde. En fait, c’était plus l’eau qu’il contenait que le septième année ne supportait pas. Mais comme il savait que la jeune fille aimait bien cet endroit, il l’avait choisi en espérant la convaincre de venir. La réponse l’avait pourtant déçu. Elle lui avait clairement fait savoir que c’était terminé, que plus jamais il n’y aurait de Timmy et de ‘Manda. Dorénavant, ils ne formeraient plus un duo. Mais convaincu qu’il lui fallait attendre près du lac, le sorcier s’y rendit tout de même à l’heure prévue. Il resta debout, face au lac, tentant de contenir sa frustration, mais surtout, son incompréhension. Il ne comprenait pas pourquoi toute cette histoire avait blessé la poufsouffle à ce point. Mais il était bien décidé à attendre qu’elle arrive, peu importe le nombre d’heures que ça lui prendrait.

Amanda marchait seule dans une rue, les larmes coulaient sans que la demoiselle n’ait le choix de les stopper ou pas. Elle était vêtue d’une mini robe noire celle-ci mettait en valeur ses longues jambes et sa poitrine. Les cheveux de la miss était attaché en un chignon mais elle n’avait prit que cinq secondes pour se coiffer … Elle n’était pas belle à voir ! Les images de la rue devenaient sombre, s’allongeaient et se rétrécissaient comme si Manda n’était pas du tout dans son état normal. Qu’avait-elle fait ? Avait-il prit une quelconque drogue ? Était-elle ivre ? Tout devint très étrange tout à coup, la voix de sa chère maman résonna dans sa tête. Douce mais terriblement touchée, des hurlements aigus résonnaient dans la tête d’Amanda qui serrait les poings. La sorcière entendit soudain entre les pleurs de sa mère quelques paroles … Ces paroles qu’elle craignait tant :

« - Amanda … Il ne se réveillera peut-être jamais ! Ma chérie … Tu me manques ! »

Miss Miller tomba au sol, la pluie tombait fortement des cieux et elle se sentait très mal. Sa coiffure était encore pire à présent mouillée, ses larmes se mêlaient aux gouttes … Amanda n’avait pas la force de se relever, elle restait assise sur ces pierres froides et désormais humides. Elle enfouit son visage dans ses genoux tout en pleurant encore plus qu’avant. La belle blonde se balança d’avant en arrière ce geste lui rappelait de très émouvants souvenirs. L’adolescente sentit soudain quelqu’un s’approcher d’elle mais elle ne releva pas la tête préférant ne plus jamais ouvrir les yeux sur ce monde trop cruel envers elle. Une main s’empara de son bras mais Amanda forçait ses paupières à rester clauses, elle ne voulait pas regarder cette personne. La jeune fille ne tenta pas de se débattre quand cet humain la serra contre lui. Était-ce l’un de ses amis ? Alexandre ? Laura ? Devan ? Ce n’était pas Laura ! Amanda reconnaissait parfaitement l’odeur de sa meilleure amie et les bras qui l’entouraient été beaucoup trop puissants pour pouvoir être ceux d’une demoiselle.

« -Amanda ! T’es devenue folle ? Tu as prit quoi ?! Amanda ! »

Cette voix … Miss Miller la connaissait ! Ce ton doux et rassurant la réconforta quelque peu et elle enfouit son visage dans ce qu’elle supposait être le torse du jeune homme qui la tenait dans ses bras. Manda avait envie de recommencer à pleurer mais ce qu’elle avait avalé rendait son esprit lent et endormi. La sorcière sentit sa tête basculer vers l’arrière mais elle l’en empêcha. Elle ne voulait pas dormir ! Comment dormir maintenant ? Comment dormir aujourd’hui ? Amanda ne pouvait pas se poser ces questions car dans son esprit régnait une vague de brume épaisse. L’adolescente n’avait plus la force de résister ni au sommeil ni à quoi que ce soit d’autre … Elle sentit que la personne qui la tenait contre lui la souleva tout à coup et commença à marcher. Où allaient-ils ? Pourquoi partaient-ils ? Miss Miller n’en savait absolument rien ! Mais elle avait reconnue la voix et une chose était sûre : Cet individu n’était pas méchant et ne lui ferait aucun mal. Sa tête bascula légèrement sur la droite pour tomber délicatement sur l’épaule musclée du jeune homme. Ses paupières toujours fermées se détendirent quelque peu et Amanda s’endormit profondément.

Ce fut dans un hurlement que la demoiselle se réveilla. Que s’était-il passé cette nuit ? Amanda passa une main sur son visage mais elle était démaquillée, elle regarda sous ses draps et constata qu’elle portait une petite nuisette pourpre. Ses cheveux était dans le même état que tous les matins et Manda ne trouva rien qui puisse lui affirmer qu’elle avait réellement vécu cette soirée immonde … Tout cela n’était peut-être qu’un simple rêve ?! Un sourire se dessina sur ses lèvres et la belle blonde jeta ses couvertures d’un geste rapide et se dirigea en courant vers la salle commune sans se préoccuper de la tenue très légère qu’elle portait ou même de l’heure très matinale que le réveille-matin affichait. Miss Miller se dirigea à grands pas vers la bibliothèque où elle reprit son journal intime, personne n’était présent dans la pièce. Elle jeta la chose sur une table et ouvrit la première page. La sorcière tourna les pages à une vitesse accélérée pour enfin se stopper à l’une d’entre elle. Une petite et fine enveloppe rose était posée entre les deux pages. La demoiselle la prit d’une main tremblante et lu les quelques lignes écrites sur le bout de papier parfaitement plié et sentant une douce odeur qui rappelait fortement à Amanda le parfum préféré de sa maman. Les larmes montèrent sans que l’adolescente ne puisse les empêcher et une grosse impression de déjà vu s’imposa à elle. Manda était à la fois terriblement triste mais aussi très en colère … Elle voulait retourner chez elle pour réconforter sa pauvre maman.

La Poufsouffle se leva et se dirigea vers le feu qui crépitait dans la cheminée, ce n’était pas un rêve ! Ou probablement pas … Quelqu’un l’avait raccompagnée ici cette nuit après qu’elle se soit sévèrement droguée. L’une des premières fois que Manda touchait à ce genre de chose, la demoiselle se prit la tête dans les mains. Elle avait envie de hurler et de détruire la salle commune des Poufsouffles pour faire sortir toute la haine qui résidait en elle. Amanda ne pouvait malheureusement pas démolir quoi que ce soit ici. Sa maison paierait les conséquences de ses actes à elle … Manda se laissa tomber dans un petit fauteuil face au feu et replia les jambes vers la poitrine en les encadrant de ses bras, elle enfouit sa tête dans ses genoux et continua de pleurer. Les cris de cette nuit, ils appartenaient à sa mère ! Les larmes coulaient et Miss Miller se sentait terriblement mal. La jeune fille se souvint de l’invitation de Timothé à le rejoindre au bord du lac. Tout lui paraissait si simple aujourd’hui ! Serrer dans ses bras Heaven ou Keiko serait tellement facile comparé à ce qu’elle avait à supporter. La demoiselle déplia les jambes et se dirigea vers la salle de bain pour se préparer car la vie ne s’arrêtait pas ou du moins pas pour elle !

Dès qu’elle fut prête, elle se dirigea vers la salle de cours de métamorphose. Elle pensait à tout autre chose ! Elle n’entendit pas un seul mot du professeur, ses pensées étaient totalement dans un autre monde. Manda ne s’était jamais sentie aussi mal et désespérée. Pourquoi était-ce si compliqué ? Miss Miller entendit la sonnerie qui annonçait la fin des cours mais se lever et se diriger vers la porte était trop dur pour elle, elle pencha la tête sur ses cours et écarta les quelques mèches qui se trouvaient devant son visage de ses yeux. La belle blonde entendit la voix du professeur lui demander si tout allait bien mais non … Rien n’allait en ce moment ! Amanda se leva et rangea très lentement ses affaires personnelles dans son sac et tourna le dos à l’enseignant sans prendre attention à la suite de sa phrase. Elle savait que ce geste était d’une grande impolitesse mais aujourd’hui, elle n’avait ni envie d’être polie ni d’être douce et compréhensive. La jeune fille marchait si vite dans les couloirs qu’un étudiant la bouscula, il s’excusa mais elle ne le pardonna pas. D’autres gens purent constater que la demoiselle lança à un vilain sort aux lacets du jeune homme qui s’étala quelques mètres plus loin, tombant au sol la tête la première. Amanda était tellement fâchée que même Laura, Devan et Alex ne devaient surtout pas s’approcher d’elle. Une Princess Pouffy en colère peut détruire Poudlard en une journée ! Elle se dirigea d’un pas rapide vers le lac, elle voulait en finir avec toute cette histoire. Dire à Timothé ce qu’elle avait sur le cœur depuis le jour où leurs lèvres s’étaient effleurées et qu’il l’avait fortement repoussée. Le sorcier l’attendait comme il l’avait dit dans sa lettre, la voir procura en lui probablement un sentiment de joie. Mais Amanda ne venait pas là pour lui pardonner … Elle ne venait pas là pour lui hurler dessus non plus !

« - Il est à l’hôpital Timmy ! Il va mourir et je ne le reverrais plus jamais … »

Les larmes se remirent à couler, les yeux de la miss étaient rouges et légèrement gonflés. Elle s’approcha du jeune homme et se serra contre lui, elle avait besoin de celui qui avait été longtemps son grand frère de cœur. Manda enfouit sa tête dans le torse de Timothé et pleura pendant de longues minutes qui lui semblèrent interminables. La belle blonde n’avait rien précisé de plus au jeune garçon, il ne savait pas encore qui était entre la vie et la mort … Amanda se recula légèrement pour faire face à un Timothé inquiet. La voix de la miss résonna une nouvelle fois, elle était triste et désemparée :

« - Mon père Timmy ! Il a été percuté par un bus … Timmy aide-moi je t’en supplie ! »

Elle ne voulait pas jouer aujourd’hui, elle ne voulait pas fuir et tourner le dos à Timothé comme l’avait fait ces quelques dernières années. Amanda avait envie de rester dans ses bras et de se sentir protégée et proche de quelqu’un ! Bien sûr Laura, Devan ou Alexandre auraient été capable eux aussi de la réconforter mais la différence entre ces trois adolescents et Timothé était que Timmy connaissait personnellement le paternel de Manda pour avoir beaucoup discuté avec lui étant enfant. Ils s’appréciaient beaucoup tout les deux ! Le papa d’Amanda était l’un des seuls adultes à ne pas toujours ennuyer les deux enfants sur leur proximité. Il était très gentil et fortement protecteur, Amanda ne pouvait même pas l’imaginer en ce moment-même inconscient et presque mort c’était trop dur pour elle. Timmy avait peut-être d’autres choses prévues pour aujourd’hui mais quoi qu’il en soit, il devrait faire une grosse place à Amanda car elle comptait entièrement sur lui pour la soulager de cette profonde tristesse qui la tenait depuis maintenant deux jours et une nuit. La Pouffy se serra à nouveau contre le sorcier de Serdaigle et recommença à pleurer.

« - Tu crois qu’il est fier de moi ? »

Ça ne faisait pas très longtemps que Timothé attendait dans le parc. S’il avait été vraiment saint d’esprit, le serdaigle n’aurait pas perdu son temps à patienter, debout devant le lac. Pourtant, il y avait cet étrange sentiment, logé au fond de lui-même, qui ne cessait de lui répéter que malgré sa réponse très négative, Amanda allait venir. Timothé restait convaincu, malgré tout, que sa meilleure amie de toujours ne manquerait pas ce rendez-vous. Et il avait décidé, avant de s’y rendre, que si jamais Amanda ne venait pas, ce serait fini. Pour toujours. Le septième année en conclurait que la jeune sorcière avait définitivement fait un trait sur leur amitié passée. Et il n’insisterait plus jamais. Pour lui, ce serait chose ancienne, il finirait par oublier. C’est pour cette raison qu’il ne pouvait se convaincre de quitter l’endroit prévu. Il était certain que la poufsouffle arriverait d’une minute à l’autre. Car pour le jeune homme, arrêter une amitié aussi forte et aussi longue était carrément impossible. Comment passer à autre chose après avoir connu une personne autant, après avoir vécu tant d’expérience avec cette dernière. Amanda était la seule à connaître tous ses secrets, même les plus honteux. Elle avait été là lors des moments les plus importants et les plus inoubliables de sa vie. Elle était là le jour où Eloïse est née. Le jour où Tim entrait à la maternelle. Le jour où Yoyo, son lapin nain, est décédé. Le jour où il a reçu sa première bicyclette. Le jour où il s’est cassé la jambe. Le jour où il a failli se noyer. Le jour où s’est enfui de la maison. La seule chose vraiment importante dans sa vie dont la jeune Miller n’a pas pris part, c’était le jour de son entrée à Poudlard. Comment oublier des événements pareils, comment se mettre à fuir et à détester l’amie la plus précieuse à nos yeux ? Le sorcier avait eu beau essayer, les résultats étaient là : il s’était retrouvé au bord du lac, combattant sa phobie, l’eau… tout ça pour Amanda. Pas la peine d’ajouter à quel point sa tentative d’oubli avait échoué…

Soudainement, il eu une réaction à laquelle lui-même ne s’attendait pas. Il éclata d’un grand rire, un rire un peu nerveux, un rire glacial. Comment pouvait-il espérer autant d’une même personne ? Pourquoi faisait-il aveuglément confiance à une amie qui l’avait abandonné après un baiser sans importance ? Que faisait-il encore là à attendre, après avoir reçu un hibou lui expliquant clairement qu’elle ne voulait plus jamais le revoir ? Était-il vraiment si stupide ? Soupirant comme si son petit monde parfait venait de s’écrouler, Timothé ramassa ses affaires et tourna le dos au lac, prêt à partir. Quelle ne fut pas sa surprise lorsque, refaisant face au château, il vit la tête blonde qu’il attendait depuis une dizaine de minutes. Amanda était là. Mais elle affichait une expression qui inquiéta un peu Tim. Il aurait cru avoir à faire à une Miller en colère, prête à lui bondir dessus pour l’achever, ou bien alors une Amanda un peu découragée de se retrouver là. Au lieu de tout ça, il apercevait une poufsouffle en larmes, désespérée, sur le point de s’effondrer.

« Il est à l’hôpital Timmy ! Il va mourir et je ne le reverrai plus jamais … »

Quoi ? De quoi parlait-elle au juste ? Ou plutôt, de QUI parlait Amanda ? Son étonnement fit soudain place à une inquiétude grandissante. Si elle venait parler à lui de cette personne anonyme, c’était sûrement parce qu’il la connaissait mieux que certains de ses amis de Poudlard. S’agissait-il de quelqu’un de sa famille ? Il ne dit pas un mot, préférant laisser la jeune fille s’expliquer. Commencer à lui poser des questions n’aurait fait que la paniquer encore plus, et si elle était venue le voir lui, c’était qu’il y avait une raison bien précise. Amanda était une fille fière, orgueilleuse… elle ne serait donc jamais venue le trouver si elle avait eu un autre choix. Le fait qu’elle vienne se blottir tout contre lui raviva une tonne de souvenirs dans son esprit. C’était quelque chose de tout à fait naturel, qui ne s’était pas fait depuis belle lurette, certes, mais naturel tout de même. Il avait consolé Amanda un nombre incalculables de fois, si bien qu’elle vienne le voir ne le surprenait presque pas. Qui serait mieux placé que Timothé Smith pour lui venir en aide. Qui au monde la connaissait mieux que lui ?

« Mon père Timmy ! Il a été percuté par un bus … Timmy aide-moi je t’en supplie ! »
« Ed…. Edward ? Il a… un bus ? Percuté ? Hôpital ? »

État de choc. C’était exactement l’état dans lequel Timothé se trouvait à l’instant même. Disons que l’amas d’émotions fortes qu’il ressentait ne pouvait que donner ça. Tout d’abord, l’idée d’affronter enfin Amanda sur le passé le rendait très nerveux. Ensuite, qu’elle ne vienne pas l’avait mis en colère… puis elle se pointait, en larmes et sur le point d’exploser de tristesse, pour lui dire que son père était mourant. Edward Miller, un homme pour qui Timothé portait un grand respect. Un homme qu’il considérait comme son propre père. En fait, les Miller étaient un peu comme sa seconde famille. Ils savaient maintenant qu’il était un sorcier et en étaient heureux. Sauf peut-être son frère et sa sœur. Bref, le père et la mère d’Amanda le connaissaient presque aussi bien que leur cadette, et l’aimaient beaucoup. Il ne les avait plus vraiment revu souvent depuis sa dispute avec la poufsouffle, mais il était arrivé que monsieur Miller l’invite à aller prendre un café pour discuter un peu. Il n’était pas au courant de la raison soudaine de leur éloignement, mais il ne renierait pas pour autant un garçon qu’il appréciait. Tim ne savait pas s’il avait dit à sa fille qu’il continuait de voir son ancien meilleur ami, mais il s’en fichait un peu. Edward Miller faisait parti de sa vie et apprendre qu’il allait mourir le secouait plus qu’il ne l’aurait imaginé.

« Tu crois qu’il est fier de moi ? »
« ‘Manda, je… excuse-moi, c’est si soudain…. »

Il ne savait pas quoi lui répondre. Son cœur battait la chamade, le souffle lui manquait. Il la serrait toujours contre elle, comme si la libérer de son étreinte allait le tuer. Il n’arrivait pas à comprendre… il allait mourir sans qu’il puisse lui parler une dernière fois ? Sans lui raconter une fois de plus ses exploits à Poudlard, ses matchs de Quidditch, son amour pour Julia, ses inquiétudes récentes à propos de ses trous de mémoire… Edward Miller allait disparaître complètement et Timothé ne le verrait plus jamais. Non seulement il avait perdu Amanda, mais il allait perdre un bon confident. Il avait envie de hurler, de frapper quelque chose, de pleurer avec la jeune fille. Mais elle avait besoin du Timothé calme, réfléchi, réaliste et réconfortant. Pas du Timothé perdu, paniqué, effrayé… il camoufla alors les émotions trop intenses qu’il ressentait et se concentra sur Amanda. Il devait à tout prix la consoler. Lui dire que tout allait bien aller. Mais comment rassurer une fille qui allait perdre son père ?

« ‘Manda, je ne sais pas quoi te dire pour te rassurer… mais bien sûr qu’Ed est fier de toi. Sa cadette est une sorcière, elle va accomplir de grandes choses, et elle est quelqu’un de bien. Qu’est-ce qu’un père pourrait espérer de plus ? C’est si injuste, il ne méritait pas ça… je suis là ma puce. Tout va bien aller. »

Il l’embrassa sur le front, un geste qu’il avait si souvent répété par le passé qu’il semblait anodin. Il allait tout faire pour qu’elle se sente mieux. S’il fallait oublier leur dispute un moment, il le ferait sans hésiter. Parce que réconforter la sorcière était sa priorité à ce moment-même. Le reste du monde pouvait bien attendre.

« Essaie de te calmer, et raconte-moi exactement ce qui se passe, tu veux bien ? »

Timothé tentait de son mieux de rester calme et de ne pas laisser sa tristesse l’emporter. Il devait à tout prix comprendre la situation avant de pouvoir aider Amanda.

Tout était soudain confus dans l’esprit d’Amanda, elle avait été tellement honteuse de s’être jetée sur Timothé … Et lui, il l’avait de plus rejetée. Par fierté, elle s’était mise en colère mais au fond d’elle-même, elle savait qu’entre eux il ne pourrait jamais y avoir que de l’amitié ! Ils se connaissaient presque aussi bien qu’une sœur connait son frère. La sorcière essuya rapidement ses larmes et tenta de retrouver une respiration normale, en cessant de pleurer. C’était incroyable ! Elle devait normalement être là pour se faire pardonner de Tim … Lui présenter des excuses et lui demander de tout oublier or en ce moment, elle était dans ses bras et il la réconfortait comme s’il n’y avait jamais eu le moindre problème entre eux. Amanda afficha un petit sourire, elle s’en voulait d’avoir fais une si énorme erreur … Elle avait laissé l’un de ses meilleurs amis de côté pour une infime bêtise qu’il lui aurait pardonné le jour suivant ! La belle blonde avait cependant autre chose en tête. Elle leva les yeux pour observer Timothé. Il ne savait pas mais Edward avait tout raconté à sa fille ! À vrai dire, c’était souvent elle qui venait lui demander comment allait Tim et si tout se passait bien de son côté … Il était clair que si son ami avait eu un problème, elle se serait précipitée pour lui venir en aide. Tout comme il le faisait avec elle en cette période douloureuse.

La sorcière secoua la tête, elle ne voulait pas lui en demander tant ! Il n’était pas obligé de tout oublier pour elle … Manda ne parvint cependant pas à quitter ses bras, elle était comme pétrifiée par la nouvelle qu’elle venait d’apprendre à Tim. Les yeux de la demoiselle étaient fixés sur le visage de son ami, elle scrutait la réaction qu’elle appréhendait fortement. Il allait être sous le choc ! Il serait anéanti lui aussi … Ils avaient passés tellement de moments ensemble ! Le nombre de fois où Timothé était venu dormir chez Manda était tout simplement incalculable. La belle blonde se souvenait de leurs soirées, parfois, elle le contraignait à l’écouter déblatérer sa vie sentimentale … Timy avait pris l’habitude d’entendre sa Manda lui raconter ses frasques amoureuses. Mais il avait raté la plus douloureuse période de la vie de la sorcière ! Alors que lui coulait des jours heureux avec Julia, Amanda multipliait les échecs sentimentaux. Après avoir révélé ses sentiments à Sirious et l’avoir surpris quelques jours plus tard, main dans la main avec une autre, elle s’était jetée sur Maximilien le soir d’un bal et l’avait embrassé … Morte de honte, elle n’avait plus osé lui reparler depuis l’incident. Que s’était-il encore passé ensuite ? Il y avait aussi eu la période Seth Istari. Manda avait beaucoup souffert de ne pas pouvoir raconter tout cela à Timothé et un de ces soirs, elle lui dirait tout ! Avec tous les détails et sans aucune honte.

« - Merci Tim ! C’est vraiment gentil d’être là pour moi après ce que j’ai fais de notre amitié … »

Il la rassurait et tentait de lui remonter le moral, Timothé était le genre d’amis qu’on ne laisse pas partir pour si peu … Excepté si on est une idiote ! Lorsqu’elle sentit les lèvres de celui qui fut, il y a un temps, son meilleur ami sur son front, elle eut envie de le serrer encore dans ses bras. Désormais, la situation était claire : Il n’y avait absolument rien de plus que de l’amour fraternel entre lui et Manda. Elle l’avait toujours considéré comme son grand frère et il avait fais d’elle sa petite sœur depuis fort longtemps. Timy lui demanda alors de raconter ce qu’il s’était passé … Amanda sentit son petit cœur s’emballer et battre à tout rompre dans sa poitrine. Elle imaginait trop bien la scène pour ne pas en avoir l’esprit totalement retourné ! Son père … L’obscurité … La route … Le bus … Le sang partout sur les murs … Sa mère en larmes, hurlant comme jamais … Ses petits frères et sœurs pétrifiaient sous le choc …

« - Papa, maman et mes frères et sœurs qui ne sont pas encore à Poudlard ont été faire une balade. Je ne sais plus vraiment où ils sont allés … Mon petit frère Sam a bousculé mon autre petit frère Emile et ils se sont battus dans la rue. Maman les a séparé et s’est mise en colère … Papa qui traversait la rue s’est retourné pour voir ce qui se passait derrière lui et … Je ne sais pas trop comment ni pourquoi mais … »

Amanda ne jugea pas utile de lui donner plus de précisions, il n’avait pas besoin de ses explications pour imaginer l’état d’Edward Miller après que le bus l’ait percuté … La Poufsouffle se retint et fit d’énormes efforts pour ne pas exploser en sanglots. Elle bloquait parfois sa respiration pour stopper les larmes, elle voulait se montrer forte et cesser de sangloter mais savoir que son paternel adoré allait mourir là-bas … C’était au dessus de ses forces. Elle pencha la tête en arrière et inspira profondément une grande bouffée d’air frais. En ce moment même, elle aurait aimé être auprès de sa famille ! Pour pouvoir les soutenir et surtout voir son père. C’était sans doute son souhait le plus cher.

« - Ils l’ont transféré à l’hôpital et il a eut de très sérieux problèmes là-bas … Maman était trop bouleversée pour m’expliquer quoi que ce soit d’autre ! Elle m’a simplement dis que papa était bien loin d’être sauvé ! Ils ne peuvent pas se permettre de nous donner un jugement … Ils ont trop peur de nous décevoir ! Papa va être opéré encore trois ou quatre fois. Les chances qu’il survive à toutes ces opérations sont très faibles … »

Parler avec ces mots de son père lui fit comme l’effet d’un énorme coup de marteau dans la figure. Elle avait le vertige et l’impression que son corps devenait trop lourd pour qu’il puisse être soutenu par ses jambes. Celles-ci menaçaient sévèrement de laisser Manda tomber au sol, elle sentait aussi son petit cœur bien plus fragile que celui des autres élèves de Poudlard, qui s’emballait encore et encore. Tim était une des rares personnes à tout savoir d’Amanda ! Il savait qu’elle était atteinte d’une très grave maladie qui lui faisait parfois faire des sortes de crises cardiaques en moins importantes … Il s’était beaucoup inquiété au début, tout comme la famille de la sorcière, et ensuite il avait fais comme les autres. Il avait appris les réflexes à avoir lorsque Manda manquait d’air, lorsqu’elle s’écroulait au sol, … Toutes ces petites choses qui feraient paniquer tous les autres.

« - J’ai vraiment peur ! Je sais que c’est sérieux ! Et maman est dans un état … J’ai l’impression qu’elle va exploser … Tu aurais du entendre sa voix, Tim. J’ai plusieurs fois du lui demander de répéter plus fort. Elle parlait comme si elle n’avait plus assez d’air pour prononcer les mots. Je sais qu’elle va mal ! »

La belle blonde soupira profondément, elle n’aurait jamais du venir ! Désormais, Timothé allait être aussi paniqué qu’elle … Encore une fois, Manda n’avait servi qu’à lui attirer de nouveaux soucis. La Poufsouffle s’écarta de Tim et alla s’asseoir plus loin, elle avait l’impression de ne servir qu’à ça : S’autodétruire et détruire tous ceux qui tentaient de l’aider. La jeune fille éclata une nouvelle fois en sanglots, ne pouvant les retenir ceux-ci. Elle enfouit sa tête dans ses mains et se recroquevilla sur elle-même, totalement impuissante face à son chagrin qui la prenait d’assaut. La Poufsouffla releva la tête, en essuyant une seconde fois les larmes qui perlaient sur ses joues. Timy était resté de marbre, sans doute devait-il évaluer la situation … Ou peut-être s’imaginait-il la scène ? Manda préfère ne pas y penser, elle tourna la tête vers le château. Personne ne semblait prêt à en sortir ! Tant mieux, elle n’avait vraiment pas envie que quelqu’un vienne les déranger quel qu’il soit.

« - Je suis désolée … Je te laisse sans nouvelles et je reviens un jour pour t’annoncer une horrible nouvelle ! Je n’aurais pas du venir … »

Elle ferma les paupières et secoua lentement la tête, tout en soupirant. Malheureusement, elle était venue ! Et maintenant, Tim savait tout. Alors, elle ne l’abandonnerait pas … Plus jamais ! Manda avait besoin de lui, de son soutien et elle voulait aussi tout savoir ! Pour Julia, pour ses notes, ses projets d’avenir, … Tous les sujets trop récents pour qu’ils n’aient pu en discuter auparavant. Miss Miller se releva et s’approcha de Timy pour lui faire un dernier gros câlin, elle se recula ensuite et lui murmura sur un ton qu’elle jugeait de lamentable :

« - C’est idiot ! Je comprends pas pourquoi je n’ai pas tout arrangé dès le début … Tu m’as vraiment énormément manqué Timy ! Et je voulais te dire que … C’était sans importance ! Je t’ai toujours vu comme un grand frère et je ne veux pas que ça change ! »

Elle revint vers lui pour le laisser la prendre dans ses bras …

Timothé connaissait Amanda sur le bout des doigts. Il la connaissait mieux que quiconque à Poudlard, plus que Devan, ou Laura… il était présent le jour où la Poufsouffle était venue au monde, il était également là le jour de ses premiers pas. Il existait très peu de photos de son enfance où Amanda n’apparaissait pas. Elle faisait partie intégrante de sa vie depuis qu’il était en âge de marcher et être éloigné d’elle ces deux dernières années avait été l’épreuve la plus éprouvante de toute sa vie. Chaque seconde qui passait avait été une torture pour le Serdaigle qui se contentait d’observer sa Manda chérie de loin, et de prendre de ses nouvelles par l’entremise de Laura. Ça lui avait fait mal, si mal qu’il serait devenu dingue si elle n’était pas venue au bord du lac ce jour-là. Ne plus lui parler, ne plus la consoler, ne plus rire avec elle, ne plus la serrer contre lui et respirer le doux parfum de ses cheveux blonds… Amanda était l’une des personnes les plus chères à son cœur, la plus importante après Eloïse. Elle était sa famille, son passé et son avenir. Bien qu’ils ne soient pas du même sang, ils se connaissaient aussi bien qu’un frère et une sœur, et s’aimaient autant, voire plus. Sauf qu’Amanda n’avait jamais été autre chose qu’une petite sœur pour lui, ainsi que sa meilleure amie. S’imaginer l’embrasser, et la caresser de manière intime le répugnait, pas parce qu’elle n’était pas jolie, au contraire… mais ça lui aurait fait le même effet d’inceste que s’il avait décidé d’embrasser Eloïse du jour au lendemain. Sa réaction avait été instinctive et Timothé n’avait pas agi dans le but de la blesser. Il ne voulait tout simplement pas perdre leur si précieuse amitié pour un baiser qui n’en valait pas la peine. Toutes ces soirées où ils avaient faits des bêtises, où ils s’étaient racontés leurs joies et leurs peines… un baiser valait-il la peine de briser tout ça à jamais ? Pour Timothé, c’était catégorique; il n’aimerait jamais Amanda de la même manière qu’il aimait Julia, ou qu’il avait aimé Heaven. C’était quelque chose d’indestructible, qui durerait malgré les années qui passent. La preuve, ça semblait faire si longtemps aux yeux du garçon qu’ils étaient en froid… et la jaune et noir lui manquait toujours autant.

« - Merci Tim ! C’est vraiment gentil d’être là pour moi après ce que j’ai fais de notre amitié …

Le septième année se contentait de la serrer dans ses bras et de la bercer tout doucement. Il n’avait pas envie de répondre, tout simplement parce que ça ne servait à rien pour l’instant. Ce qui important c’était rassurer Amanda et lui dire que tout irait bien. Son amie pleurait à chaudes larmes et Timothé luttait pour ne pas s’effrondrer lui aussi. Les Miller étaient comme sa deuxième famille, et savoir que l’homme qu’il considérait comme un père combattait pour sa vie était tout bonnement insupportable. Percuté par un bus… pourquoi la vie était-elle aussi injuste ? Pourquoi il fallait que les gens les plus adorables traversent des épreuves aussi difficiles ? Si monsieur Miller décédait, il savait que jamais Amanda ne s’en remettrait. Et lui était le seul à Poudlard qui le connaisse à peu près autant que la Poufsouffle, et donc le seul qui partageait sa souffrance. Ça, Timothé le comprenait, et savait que le moral de sa petite sœur était entre ses mains tremblantes. Il ne savait plus quoi faire, ni quoi dire pour la consoler. Il attendait seulement les détails pour pouvoir évaluer la situation, et se faire une meilleure idée de l’état de son père. Ça ne tarda pas à venir, puisque la jeune fille se raidit soudainement, hésitant à parler de peur de refondre en larmes. Mais si ça arrivait, il serait toujours là.

« - Papa, maman et mes frères et sœurs qui ne sont pas encore à Poudlard ont été faire une balade. Je ne sais plus vraiment où ils sont allés … Mon petit frère Sam a bousculé mon autre petit frère Emile et ils se sont battus dans la rue. Maman les a séparé et s’est mise en colère … Papa qui traversait la rue s’est retourné pour voir ce qui se passait derrière lui et … Je ne sais pas trop comment ni pourquoi mais … »

Premier choc. Timothé l’encaissa en ignorant la boule qui se formait dans le creux de son estomac. Tout son corps était parcouru de frissons et ses muscles tremblaient nerveusement. Il n’avait pas envie d’entendre la suite… la suite, il la connaissait déjà. Non, c’était trop dur, il ne pourrait pas écouter les mots qu’Amanda prononcerait par la suite. Mais quels qu’ils soient, le bleu et bronze ne la laisserait pas toute seule. S’il le fallait, ils iraient tous les deux à l’hôpital et soutiendraient la famille Miller du mieux qu’ils le pouvaient. La mère d’Amanda ne pourrait jamais affronter seule la mort de son mari, et ses frères et sœurs, que Timmy considérait également comme les siens… ils étaient beaucoup trop jeunes pour surmonter une telle épreuve. Il remercia silencieusement la sixième année de ne pas donner les détails de l’état de monsieur Miller après que le bus l’ait percuté. Il faisait de son mieux pour chasser les images qui défilaient dans son esprit, empoisonnant lentement sa tête de pensées trop sombres. Timothé ne pouvait pas pleurer, il refusait de se montrer aussi faible. Il devait protéger Amanda et se montrer courageux. Il en avait oublié leur longue dispute et leur froid tellement son amour pour elle avait repris le dessus. Il se fichait de leur réconciliation maintenant. Tout ce qui importait, c’était qu’Amanda continue de sourire. Et peu importe le temps que ça prendrait avant que ça arrive, le jeune Smith ne lâcherait pas. La serrant un peu plus dans ses bras, il avait la respiration saccadée, et lui caressait les cheveux sans oser dire un mot.

« - Ils l’ont transféré à l’hôpital et il a eut de très sérieux problèmes là-bas … Maman était trop bouleversée pour m’expliquer quoi que ce soit d’autre ! Elle m’a simplement dis que papa était bien loin d’être sauvé ! Ils ne peuvent pas se permettre de nous donner un jugement … Ils ont trop peur de nous décevoir ! Papa va être opéré encore trois ou quatre fois. Les chances qu’il survive à toutes ces opérations sont très faibles … »

Il s’était attendu à un tel discours, mais n’avait pas réalisé l’effet d’une bombe que ça lui procurait. S’il avait pu s’écrouler encore plus, il l’aurait fait. Timothé avait l’impression que le ciel s’effrondrait sur sa tête, et l’envie de s’enfoncer dans le sol pour ne plus jamais sortir était plus que jamais tentante. Échapper à cette nouvelle, ne plus ressentir cette peur qui le rongeait… il devait oublier ses craintes et se concentrer sur Amanda. Il ne devait pas la laisser seule, elle avait trop besoin de lui. Surtout, il devait absolument la calmer, car si elle continuait à pleurer ainsi, et respirer aussi rapidement… son cœur ferait des siennes encore une fois. Timothé se souvint de la toute première attaque de son amie en sa présence. Ils jouaient tous les deux dans le parc près de chez-eux, et comme d’habitude ils s’étaient disputés. Timothé avait crié à Amanda qu’il ne lui parlerait plus jamais, et elle s’était sentie si mal que soudain, elle s’était effondrée au sol, inconsciente. À ce moment-là, le garçon n’avait pas su quoi faire et s’était contenté de hurler pour qu’on leur vienne en aide. Suite à cet incident, les parents d’Amanda s’étaient assis avec lui et avaient expliqué la maladie de leur fille. Timothé n’avait pas trop compris à l’époque, mais avait bien assimilé les mesures à prendre si un jour la même chose se produisait. Berçant encore Amanda tout contre lui, le garçon inspira un bon coup et ferma les yeux. Il fit de son mieux pour contenir sa peine et sa douleur, et essuya avec attention les larmes de sa sœur de cœur. Il l’aimait, il l’aimait tellement. Que ferait-il sans son sourire, et sans son rire si mélodieux ?

« - J’ai vraiment peur ! Je sais que c’est sérieux ! Et maman est dans un état … J’ai l’impression qu’elle va exploser … Tu aurais du entendre sa voix, Tim. J’ai plusieurs fois du lui demander de répéter plus fort. Elle parlait comme si elle n’avait plus assez d’air pour prononcer les mots. Je sais qu’elle va mal ! »

« ‘Manda, tout ira bien. Peu importe ce qui arrive, tout ira bien. Vous êtes une famille soudée, vous l’avez toujours été. Et mes parents seront là aussi pour ta mère. Et je suis là… nous sommes tous là. On va s’entraider, et ensemble on va s’en sortir. Tu m’entends ? Ça va aller ma puce. »

Il l’avait appelé comme ça parce qu’il avait besoin qu’elle sente qu’il l’aimait, et qu’il ne la quitterait pas. Il serait là, toujours, peu importe les circonstances. Que l’histoire se termine bien ou mal, Timothé soutiendrait son amie. Le destin les avait réuni de nouveau, certes, pas dans la joie… il aurait préféré rester en froid avec elle plutôt que d’apprendre que monsieur Miller luttait pour sa vie. Mais maintenant qu’ils étaient de nouveau ensemble, ils seraient plus forts que jamais. Car surmonter une épreuve à deux était beaucoup plus facile que de la surmonter seuls, et il fallait qu’Amanda comprenne ça. Soudain, elle le repoussa doucement et s’éloigna de lui pour aller s’asseoir plus loin. Timothé l’observa, les yeux brouillés par les larmes qui risquaient de couler à tout moment. Son cœur battait à une vitesse folle et son corps semblait appartenir à un autre. Il restait figé là à la regarder, incapable de faire le moindre geste. Alors qu’elle éclatait une nouvelle fois en sanglots, Timothé demeurait immobile. Que pouvait-il faire ? Ses mains tremblaient si fort, et ses jambes étaient si faibles qu’il était certain de tomber s’il tentait de se mettre debout. Il la vit tourner la tête vers lui, puis en direction du château. Apparemment, elle voulait s’assurer que personne ne voyait la scène ou ne venait les déranger. S’ils devaient surmonter tout ça, ils le feraient ensemble, mais nul besoin de quelqu’un d’autre.

« - Je suis désolée … Je te laisse sans nouvelles et je reviens un jour pour t’annoncer une horrible nouvelle ! Je n’aurais pas du venir … »

Ces mots lui firent mal, car Amanda n’avait pas le droit de dire ça. Timothé était son ami, celui qui l’avait vu naître, marcher, prononcer ses premières phrases… alors si quelqu’un à Poudlard était en droit de connaître les vraies choses, qu’elles soient horribles ou carrément géniales, c’était bien lui. Il se rendait compte qu’il avait manqué beaucoup d’événements dans la vie de la Poufsouffle, et qu’elle aussi n’avait pas été là lors de sa rupture avec Heaven, ou lors de ses crises de paniques à cause des trous noirs qui se faisaient de plus en plus fréquents. Il sortait également avec Julia, avait décidé de devenir apprenti en Sortilèges et Enchantements… mais ça, elle n’était pas au courant. Et ça lui faisait un drôle d’effet, car avant elle était la première à qui Timothé racontait ce qui lui arrivait de bon ou de mauvais. Il ne répondit cependant pas, sa gorge étant trop sèche pour qu’il émette le moindre son. Le Serdaigle la vit simplement se lever, venir vers lui, le serrer dans ses bras et se reculer de quelques pas.

« - C’est idiot ! Je comprends pas pourquoi je n’ai pas tout arrangé dès le début … Tu m’as vraiment énormément manqué Timy ! Et je voulais te dire que … C’était sans importance ! Je t’ai toujours vu comme un grand frère et je ne veux pas que ça change ! »

Elle n’avait même pas eu le temps de finir sa dernière phrase que Timothé se jetait dans ses bras. Quelqu’un assistant à la scène aurait probablement imaginé un scénario débile, un peu comme l’avait fait cet idiot de Garnaliel lorsqu’il l’avait supris à enlacer Laura dans les couloirs en pleine nuit. Mais tous deux savaient que ce n’était que de l’amitié, une amitié bien plus forte que ce que beaucoup de jeunes de leur âge connaissaient. Une amitié qui pouvait résister à tout, ils en avaient maintenant la preuve sous les yeux. Mais savoir qu’il avait manqué à Amanda le soulageait grandement. Il se mit soudainement à pleurer, sans vraiment savoir pour quelle raison. La joie de la retrouver ? L’accident de son père ? Un trop plein d’émotions qu’il se devait d’évacuer ? C’était probablement un mélange de tout ça. Timothé sanglotait maintenant lui aussi, la tête enfouie dans le creux de la nuque de son amie. Il trouva tout de même la force de parler pour quelques instants, même si c’était presque inaudible, et qu’il devait prendre des pauses sans arrêts pour renifler.

« Chuuut. Ne dis plus rien. Tout ça n’a pas d’importance ‘Manda. Je t’aime, et je t’aimerai toujours. Tu es ma sœur et ça ne changera jamais tu m’entends ? Peu importe la distance ou le nombre de disputes, je ne pourrai jamais supporter d’être séparé de toi comme ça de nouveau. Ne me refais plus jamais ça… je pense que personne au monde mis à part ta famille ne t’aime autant que moi. Je serai là, et on affrontera tout ça ensemble. »

Il était si content de l’avoir de nouveau près de lui… mais en même temps, cette nouvelle le mettait dans tous ces états.




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